Les rentiers de la politique nous livrent aux serres des vautours
Dans toute la mesure de nos modestes moyens, et comme beaucoup d’autres, nous nous opposons viscéralement à la montée des populismes fascisants, qui usent de vieilles ficelles pour prendre le pouvoir. Tous les pouvoirs.
Effacer nos mémoires pour nous formater
Qu’on ne s’y trompe pas : nous ne fustigeons par nos concitoyens tentés par le vote pour le Rassemblement National et assimilés (Ciotti pour ne pas le nommer) parce que leurs motivations sont souvent très compréhensibles. Passons sur les pauvres esprits qui ne carburent qu’à la haine et au racisme, et notamment les géniteurs de ces mouvements xénophobes et réactionnaires (Le Pen, Zemmour, Ciotti, etc.). Pour les autres, l’adhésion massive au RN que chacun constate aujourd’hui se nourrit des difficultés sociales très concrètes auxquelles sont confrontés de très nombreux citoyens.
Que peut-on leur reprocher, sinon une amnésie ou un déni de l’histoire tragique du XXème siècle ?
Notamment l’oubli de la façon dont a été bâti et défendu notre pays : citons la contribution des générations d’étrangers qui ont mis les mains dans le béton pour reconstruire notre pays dès l’après-guerre (à Nice comme ailleurs), qui ont donné leur vie pour nous défendre contre l’envahisseur nazi (des dizaines de milliers de coloniaux[1] et de résistants, comme ceux des FTP-MOI, dont les Arméniens Missak et Mélinée Manouchian, honorés au Panthéon de la République), qui contribuent au rayonnement culturel de notre pays, et tant d’autres apports. Notamment aussi, la nécessité d’une Europe unie et non une Europe crispée sur ses nationalismes belliqueux, qui ont tant fait souffrir nos aînés et aïeux.
Un plateau appétissant de boucs émissaires
Quand une personne est, ou se ressent, en précarité, elle devient très sensible au discours des bonimenteurs politiques et médiatiques qui leur présentent un plateau appétissant de boucs émissaires : « certains » étrangers, les technocrates européens, les écologistes, les féministes, les wokistes, etc. Les premiers piquent goulûment dans nos assiettes – et veulent nous « grand-remplacer », les seconds nous contraignent de manière machiavélique, et les derniers veulent nous renvoyer à l’âge des cavernes et déconstruire notre bonne vieille civilisation française… Si votre cerveau se laisse happer et convaincre par ces visions fantasmagoriques en forme d’épouvantail, comment le corpus simpliste des RN & co pourrait-il ne pas vous intéresser ?
Pour résumer : une grande partie de nos concitoyens est en voie de précarisation, alors qu’une minorité s’enrichit comme jamais, et certains ont compris tout l’intérêt d’exploiter cette détresse pour imposer leurs idées nauséabondes d’un autre temps, faites de crispations et d’isolement, d’ostracisations, de rejets et de division, de haine et violence, d’inhumanité. D’un côté, des victimes, et de l’autre, des prédateurs et leurs vils collaborateurs (« collabos », si vous préférez). L’exemple d’Hénin-Beaumont, tombé dans les serres du vautour Marine Le Pen, est très éclairant à cet égard…
L’abandon des politicards rentiers et privilégiés
Mais l’essentiel est probablement ailleurs : nous éprouvons beaucoup de rancœur contre toute cette classe politique conservatrice qui, depuis des décennies, est aveugle à cette détresse populaire, et au sentiment d’abandon des personnes galérant dans les quartiers et les campagnes. Les rentiers de la « politique classique » ne savent que construire leurs prés carrés et tisser leurs réseaux, développer leur plan de carrière, conserver leurs privilèges, et se répandre en discours et en promesses non tenues. Et passons sur le sentiment d’injustice ressenti par la population devant l’impunité de nombreux dirigeants publics qui abusent et dévoient les pouvoirs qui leur ont été conférés par les urnes.
Les sentiments d’isolement et d’injustice sont, non pas des sources, mais des torrents de révolte.
Les gens sont fatigués et lassés d’entendre encore se pavaner des Cahuzac, Balkany, Sarkozy, et tant d’autres, alors qu’ils ont été pris la main dans le pot de confiture, de voir revenir sempiternellement les mêmes « vieux » politicards (Copé, Valls, Bayrou, Hollande, etc.), de voir les clans de copains s’accrocher au pouvoir (citons Estrosi à Nice, et ses querelles permanentes et puériles avec Ciotti), de subir des contraintes croissantes (pouvoir d’achat, retraite, chômage), de subir des flots de 49.3, de voir que les femmes peinent toujours à se faire entendre, d’assister au spectacle indécent des privilégiés (qui ont oublié que la fin des privilèges avait été votée par l’Assemblée constituante le 4 août 1789)… Comme pour la question majeure du changement climatique, les rentiers palabrent, mais les problèmes de fond subsistent. Toujours à Nice, le taux de pauvreté n’a jamais diminué, dépassant en moyenne les 21%, et se rapprochant des 30% chez les jeunes de moins de trente ans. Or le maire, qui se prétend « gaulliste social » est aux manettes depuis 2008. En revanche, il sait apporter des affaires au monde du BTP en livrant aux bétonnières la Plaine du Var, ou du business aux hôteliers & restaurateurs en soutenant le surtourisme, qui ne profite qu’à quelques-uns. Estrosi, comme beaucoup d’autres rentiers de la politique, ont abandonné les gens depuis longtemps, préférant le business et le clientélisme tellement plus efficace électoralement ! Et ce ne sont pas leurs débauches de communication qui peuvent compenser ces failles béantes.
Toute la copie est à revoir !
Il est extrêmement dommageable – et dangereux, qu’à défaut d’écoute et de volonté, près de la moitié de nos concitoyens pense trouver une réponse dans les mouvances politiques les moins recommandables.
Comment oublier que le mouvement RN a été créé par des barbouzards revanchards de la Waffen-SS et de l’OAS ? Comment croire que leur ADN a évolué ? Le jeune Bardella en costume trois pièces, expert en selfies, est un trompe l’œil, un piège à souris, un traquenard, une machine à mensonges et à manipulations.
Et, puisque nous parlons de copie à revoir, ajoutons que Bardella est un ex-cancre à l’école…
Les responsabilités de cette mascarade ne sont pas à chercher ailleurs que dans la faillite de celles et ceux qui n’ont pensé qu’à leur nombril, à leurs copains et à leurs petits intérêts. Celles et ceux qui ont fait si peu pour intégrer les populations dont nous avons exploité le travail, et qui en ont abandonné une partie au profit des fondamentalismes, toujours avides de détresses. Celles et ceux qui s’agitent, parlent de changement – voire de révolution (Macron, Estrosi et d’autres), alors qu’ils font le maximum pour faire perdurer un système à bout de souffle, un conservatisme générateur d’inégalités et de destructions environnementales qui condamnent l’avenir de nos enfants.
Ce sont ces politicards qui poussent nos concitoyen-nes dans les serres des vautours.
Aux armes (démocratiques), les jeunes !
Nous appelons au soulèvement des jeunes, et des femmes en particulier : qu’ils et elles investissent la politique (vraie et sincère), et les instances du pouvoir pour transformer notre société vers plus de solidarité et de durabilité. Et au passage, dégager toute cette clique de rentiers. Les opportunités approchent, au-delà du 7 juillet 2024 : 2026 (municipales) et 2027 (présidentielles), par exemple. Mais tout ne se joue pas que dans les urnes. Être citoyen-ne est un statut à défendre et à protéger au quotidien. Bec et ongles.
« Il faut choisir : se reposer ou être libre » (Périclès, cité par Thucydide).
[1] 178.000 Africains et Malgaches et 320.000 Maghrébins ont été appelés en 1939-1940.