Muselier et Ciotti dans le même bac à sable
L’apparence, valeur centrale des conservateurs archaïques
21 juillet 2022. Deux enfants turbulents de la droite conservatrice, Renaud Muselier, président de la région PACA, et le Maralpin Éric Ciotti, député LR et questeur de l’Assemblée nationale, ont un peu plus dévoilé le fond de la pensée droitarde française, telle qu’elle est devenue : arrogante et dépassée.
Renaud Muselier, tout d’abord, a tenté de crier tout le mépris qu’il porte au camp progressiste, dont il faut rappeler que les députés ont été élus démocratiquement par le vote des Français lors des dernières Législatives. Comment ? En fustigeant le comportement de députés de gauche à l’Assemblée : « Vous voyez la gauche sale, débraillée, qui crie partout », et s’adressant à eux, comme un vieux père de famille : « Vous représentez la République, vous avez une charge, vous n’êtes pas dans une cour de récréation. […] Vous sortez du bac à sable et vous êtes chez les grands. »
Évidemment, de nombreux députés ont su interroger sa curieuse amnésie, en lui rappelant qu’il avait été élu à la tête de la région PACA grâce aux voix de la gauche. Quand beaucoup d’autres ont été abasourdis par tant d’arrogance et ce ton paternaliste !
Comme un duo synchronisé, ce fut au tour d’Éric Ciotti, le meilleur ennemi de Christian Estrosi, lui-même meilleur ami de Renaud Muselier, de demander à la Présidence de l’Assemblée nationale de rendre obligatoire le port de la cravate. Sait-il seulement que l’article 9 de l’Instruction générale du Bureau de l’Assemblée prévoit seulement que la tenue vestimentaire des députés dans l’hémicycle doit « rester neutre et s’apparenter à une tenue de ville » ? Et, n’en déplaise au trublion Ciotti, cet article proscrit également le port de … l’uniforme. Or le port systématique de la cravate pour les hommes ne s’apparente-t-il pas à un … uniforme (« vêtement déterminé, obligatoire pour un groupe », selon le dictionnaire Le Robert) ? Car, dans l’esprit crispé de ces hommes d’une droite aussi sotte qu’archaïque, quoi de plus jouissif que de voir tous les représentants du peuple alignés dans une même tenue, et ne s’exprimant que sur un ton convenu et aseptisé, fusse pour maintenir des statuquos inappropriés ?
L’exemplarité sélective des conservateurs
Plutôt que de focaliser notre attention sur la cravate, faisons-le sur ce qui est censé être propre et exemplaire, aux yeux de Renaud Muselier. Rappelons ici que cet élu a toujours apporté un « soutien total » à l’ex-Président de la République Nicolas Sarkozy, y compris après sa condamnation à un an de prison dans l’affaire Bygmalion (ce que n’a pas manqué de faire son copain de cour d’école et maire de Nice). Ou encore qu’il a été impliqué dans des irrégularités dans la passation de marchés publics. Dans ce cadre, le juge d’instruction Franck Landou avait d’ailleurs mis en examen plusieurs personnes en 2012, dont Stéphane Clément, l’épouse de Renaud Muselier (à l’époque), pour recel d’atteinte à la liberté et à l’égalité d’accès aux marchés publics, et recel de prise illégal d’intérêts (source : https://marsactu.fr/la-justice-ravive-une-affaire-embarrassante-pour-renaud-muselier/). Souvenons-nous également de sa demande de nationalité mauricienne (un paradis fiscal) pour y développer son activité de promoteur. Renaud Muselier avait d’ailleurs reçu les honneurs des médias Bakchich et Canard Enchaîné pour les 33 villas construites pour des contribuables avides de défiscalisation. Son frère politique, Éric Ciotti, s’est vu quant à lui visé par une enquête du parquet de Nice, concernant les moyens de la présidence du conseil départemental possiblement mis à sa disposition (suite au signalement réalisé par l’association Anticor 06 le 12 septembre 2019).
Il nous semble, en tant que citoyens droits dans leurs bottes (selon une terminologie qui devrait plaire à ces obsédés de l’ordre, quand il est appliqué aux autres), que les valeurs politiques, dans le sens noble des termes, devraient s’intéresser aux valeurs humanistes et écologistes, dans les temps gonflés d’enjeux cruciaux que nous connaissons aujourd’hui, plutôt qu’à l’uniformisation de la tenue vestimentaire des représentants du peuple. Par ailleurs, qu’est-il de plus sale et débraillé que de parler d’ordre et de valeur, quand on ne montre pas soi-même l’exemple ou que l’on honore les corrompus ? Qu’est-il de plus sale, moralement, que de rabâcher que sa région a « une COP d’avance », alors qu’elle augmente ses émissions de gaz à effet de serre (+2% en un an, au lieu de les réduire courageusement de -6 à -7% par an) ? Le mensonge est-il une valeur conservatrice ? Qu’est-il de plus sale que de demander le retour du service national quand on a soi-même été exempté dudit service ? C’est pourtant ce que s’est permis Éric Ciotti en 2015. Son tweet du 30 octobre 2015 : « Je propose un service national obligatoire pour replacer des repères sur le chemin de notre jeunesse. (…) #autorité »…
Cette politique archaïque, dépassée et crispée, peu encline à l’exemplarité, ne vise que les apparences et l’alignement des pensées (« le petit doigt sur la couture du pantalon »). Que les débats s’animent sur l’augmentation du salaire minimum, ou sur l’écologie, et voilà qui semble ne plus passionner ses représentants. La vraie question : supportent-ils seulement la contradiction ? Nous faut-il leur offrir un dictionnaire pour leur rappeler que le mot Parlement est issu du verbe parler, lui-même venant du latin liturgique parabolare, parler par parabole, puisque ce lieu central de la démocratie française est bien « l’endroit où l’on parle » ?
La passion réactionnaire des traditions et de l’immobilisme
Ce qui nous concerne n’est pas tant de l’ordre de la couleur de la cravate que de l’intérêt général. Les conservateurs de la droite française conservent parfaitement leur retard, figés sur des valeurs souvent passéistes et désuètes, et arc-boutés sur des traditions folkloriques, loin des valeurs progressistes et réformatrices que nous imposent les crises successives que nous connaissons en ce début de siècle. Notons d’ailleurs que ce qui les intéresse dans la tradition religieuse est plus de l’ordre du maintien inconditionnel du cadre (l’ordre du goupillon) que de l’esprit de solidarité et de partage promu par ces mêmes religions. En d’autres termes, ces conservateurs sont des personnages superficiels et hypocrites…
Ces réflexions libres ne relèvent pas du wokisme, mais juste du pragmatisme nécessaire pour répondre aux enjeux modernes et nous sortir de cette idéologie sentant bon l’esprit réactionnaire, la période Louis-Philippe et la naphtaline des vieilles armoires de merisier, défendue par les sieurs Muselier et Ciotti (et leur acolyte ou ennemi Christian Estrosi). Au fait, n’y aurait-il pas de sujet plus crucial pour les Français, que la cravate ou le ton des interventions de leurs représentants ?
Mais comme nous sommes vernis dans le grand Sud ! Comme des petits souliers d’enfants sages…
2 thoughts on “Muselier et Ciotti dans le même bac à sable”
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Thank’s a lot.
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