Ces dernières années, notre territoire a été littéralement livré aux bétonnières ! Il est temps de nous tourner vers un modèle beaucoup plus respectueux des espaces naturels et des espaces publics
Sortir de la métropolisation sauvage par le post-urbain et la bio-région ?
Face aux dérives liées au phénomène de métropolisation et de mitage par une bétonisation croissante (et Nice en est un exemple probant !), des scientifiques, des enseignants chercheurs et des associations, travaillent avec ardeur sur l’idée d’une société redevenue nourricière, en désurbanisant la terre, et réempaysannant les territoires. Plusieurs voies se dessinent : celle d’une écologie post-urbaine, et celle complémentaire du biorégionalisme (concept datant déjà des années 60). Lire ici (PDF).
Alors, quelles solutions envisager ?
En attendant, des solutions très pratiques sont envisageables et réalisables. Elles ne demandent que du courage politique :
- En tout premier lieu, appliquer la démarche ERC à tous les projets d’urbanisation et documents de planification :
- Prioritairement, éviter les atteintes prévisibles à l’environnement, et donc les constructions non absolument nécessaires
- A défaut de pouvoir éviter certaines de ces atteintes, en réduire la portée
- Et en dernier recours, compenser les atteintes qui n’ont pu être ni évitées ni réduites
- Décréter urgemment un moratoire sur :
- les constructions de bureaux (tertiaire) et de commerces,
- l’urbanisation de la Plaine du Var, seul secteur à haut potentiel agricole, de façon à diminuer le niveau de dépendance alimentaire,
- toute extension d’hyper-surfaces commerciales ou autres, grandes consommatrices de surfaces de plancher,
- l’urbanisation des collines.
Il est impératif et urgent d’arrêter l’artificialisation des sols, tant en plaine qu’en secteur collinaire. Les chantiers BTP doivent majoritairement se réorienter vers la réhabilitation et la rénovation des logements anciens. L’ère de la chasse à la « dent creuse » doit cesser.
- Développer et dynamiser les projets d’urbanisme circulaire. Il est nécessaire de rappeler qu’il y a un facteur 10 entre l’impact carbone de la construction et celui d’une rénovation complète ! Même constat pour les quantités de matières consommées (source PTEF du Shift Project). Il est presque toujours plus pertinent de rénover et réhabiliter que de construire. Bouygues construction semble l’avoir compris, prévoyant d’ici à 2050, de consacrer 95 % de son activité à la rénovation, contre de 5 % à 10 % aujourd’hui. C’en est fini de la « tabula rasa » : le XXIème siècle doit composer avec le « déjà-là ».
- Créer et généraliser les parkings silos enterrés pour libérer les espaces publics monopolisés par la voiture, afin de les végétaliser, ou les offrir à des aires arborées de covoiturage, à des aires de jeux et de sports, à des jardins ou des potagers partagés, etc.
- Mettre un terme à la recherche d’attractivité démographique et touristique et privilégier la qualité de vie des habitants, par une réhabilitation de l’urbanisme existant.
- Entreprendre la révision en profondeur du PLUm (Plan Local d’Urbanisme métropolitain) dans ce sens, et initier un vaste plan de renaturalisation (zones agricoles) de parcelles actuellement urbanisables.
- Lorsqu’on évoque les espaces verts aménagés, il est utile de distinguer ceux aménagés sur dalles (ex : promenade « Coulée Verte », jardin Jeanne d’Arc, Sulzer, etc.) de ceux qui le sont en pleine terre (ex : plaine du Var, Saint-Jean d’Angély, squares en centre-ville, etc.).
- Lorsque les projets d’urbanisme s’imposent néanmoins, des solutions existent pour en réduire fortement l’empreinte environnementale, et climatique en particulier. Le béton devrait d’ailleurs être réservé aux grandes infrastructures, et, pour le reste, laisser place au bois, à la terre, la pierre, la paille. Les plus engagés ne jurent que par le réemploi, et la pratique prend de l’ampleur. Quelques illustrations :
- ciment d’argile crue local et bas carbone développé notamment par de jeunes entrepreneurs landais, terre crue, etc.
- ciments ternaires (mélangés à des cendres volantes, de la fumée de silice, des laitiers de hauts fourneaux, etc.), voire le nouveau ciment « zéro carbone » Cambridge Electric Cement, créé en 2022 par des ingénieurs de Cambridge (four à électroarc),
- constructions en matériaux biosourcés (bois, chanvre, liège, paille, issus d’exploitations durables), et géosourcés (argile, terre nue, pierre, par exemple).
- Transformer les logements vacants et les résidences secondaires en résidences principales, diminuer drastiquement le nombre de constructions neuves, et réduire de 30 % la taille des maisons individuelles (extrait du 1er des 4 scénarios de l’étude « Transition(s) 2050 », réalisée par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME)).
- Enfin, et ça n’est pas la moindre des priorités, ré-impliquer les citoyens – et les écouter !, dans les processus de décisions relatifs aux grands projets d’urbanisme du territoire.