Nice : tour de passe-passe pour cacher l’échec du plan Climat !
Trois ans après son instauration, le Conseil de Métropole pour le Climat vient d’être dissous sans préavis, ni concertation, sur fond d’errements et d’échec chronique du plan Climat niçois (PCAET). La mascarade continue !
Un plan Climat prévoyant stratégie, évaluation et concertation
Seconde édition du plan climat niçois initié en 2012, le Plan Climat Air Énergie Territorial (PCAET) de la Métropole Nice Côte d’Azur 2019-2025 a été validé par la Préfecture des Alpes-Maritimes le 31 octobre 2019. Ce plan climat s’inscrit dans le cadre de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte (dite LTECV). La loi est donc très claire : ce plan Climat doit faire l’objet d’un suivi rigoureux.
De fait, le corpus du PCAET 2019-2025 comprend une 3ème partie intitulée « Stratégie territoriale » (organisation et gouvernance), ainsi qu’un ensemble de fiches-actions, dont l’annexe n°3-5 décrivant le domaine V : « Organiser l’animation, le suivi et le pilotage du plan climat ». Parmi ces fiches-actions, relevons celles-ci :
- Fiche V.1.1 : comité de pilotage (au moins 2 réunions par an) et comité de pilotage élargi (au moins 1 réunion par an)
- Fiche V.1.2 : plan de médiation
- Fiche V.2.1 : évaluation du PCAET (gaz à effet de serre (GES), puissance installée énergies renouvelables (EnR), économie d’énergie, qualité de l’air)
- Fiche V.2.2 : bilan carbone patrimoine et services : rendu public, mis à jour tous les 3 ans (dernières mises à jour 2016, 2019)
- Fiche V.2.4 : forum annuel du PCAET
Faut-il préciser que le public niçois n’a reçu aucune information sur la tenue effective et le bilan de ces comités de pilotage (COPIL) annoncés ?
La mascarade du Conseil de Métropole pour le climat niçois
Le 4 février 2021 a été officiellement installé un Conseil de Métropole pour le climat, soit plus de 15 mois après la décision de sa création le 25 octobre 2019.
Son rôle était annoncé ainsi :
- Rassembler les acteurs du territoire
- Partager le suivi des actions
- Mobiliser et se coordonner
- Faire émerger de nouveaux projets
Ce conseil était composé de 60 membres, répartis au sein de 5 collèges :
- Métropole NCA : 5 sièges
- Autres institutions (personnes publiques associées) : ADEME, DREAL, DDTM, etc. : 7 sièges
- Acteurs socio-économiques : 14 sièges
- Université Côte d’Azur et communauté scientifique : 4 sièges
- Citoyens et associations : 30 sièges (après collecte des candidatures en octobre-novembre 2019) : 12 associations et 18 citoyens
Son fonctionnement était théoriquement basé sur la mise en place de 6 groupes de travail : bâtiment, mobilité, énergies renouvelables (EnR), déchets, alimentation, résilience et végétalisation.
Vingt-deux mois plus tard, le constat est le suivant :
- Très peu de réunions de ces groupes de travail ont été organisées par la métropole, avec une constante : absence d’ordre du jour, de compte-rendu des travaux des 5 collèges, et de diffusion au sein de l’ensemble des 60 membres du Conseil de Métropole pour le climat.
- Aucune réunion plénière n’a jamais été organisée depuis l’installation de ce Conseil.
- Aucune information n’a été diffusée.
La métropole de Nice est donc clairement hors la loi !
Mesure probablement palliative, ont été mis en place des « cafés de l’écologie positive » (le 4ème a eu lieu le 16 novembre 2022), organisés en ville, sortes d’espaces de bavardages décousus ne donnant lieu à aucun ordre du jour, ni présentation substantielle, ni compte-rendu. Les agents de la métropole s’y trouvent d’ailleurs généralement plus nombreux que les citoyens … C’est dire combien ces soi-disants rendez-vous avec les citoyens sont une mascarade.
Le Collectif Citoyen 06 a dénoncé ce théâtre à plusieurs reprises. Un exemple ici :
Coup de Trafalgar et tour de passe-passe climatique à Nice
Dans un geste inopiné, et marqué d’un mépris certain pour les membres du Conseil de Métropole pour le climat qui lui ont accordé leur confiance, Christian Estrosi, président de la métropole NCA, a fait voter la délibération n°0.1 (2303), lors du conseil métropolitain du 14 décembre 2022 : « Nouvelle gouvernance climat de la Métropole Nice Côte d’Azur ». En page 3, celle-ci juge que « le Conseil de Métropole pour le climat institué par délibération en date du 25 octobre 2019, a constitué une première phase de mobilisation des principaux acteurs du territoire, mais n’est plus suffisant pour répondre à la nécessité de mobiliser plus largement autour des objectifs métropolitains et au regard de l’aggravation du réchauffement climatique et ses conséquences attendues. » Ainsi :
- La délibération n°1.01 du Conseil métropolitain du 25 octobre 2019 instaurant le Conseil de Métropole pour le climat est abrogée.
- Un Conseil local d’experts pour le climat est créé, en vue d’élaborer une stratégie d’adaptation et de résilience du territoire face au dérèglement climatique.
- Il sera procédé à la désignation des membres du Conseil local d’experts,
- Une Convention citoyenne sera lancée.
Il est précisé qu’un appel à candidatures sera lancé pour sélectionner 100 citoyens d’ici la fin du 1er trimestre 2023 (a priori du 5 janvier au 5 février), par le biais d’un tirage au sort. Ces citoyens devraient rendre leurs propositions d’ici fin 2023.
Pour information, ce changement de gouvernance n’avait jamais été prévu ou annoncé dans le PCAET.
Un aveu d’échec !
Le plan climat niçois a tout d’un long parcours d’errements communicationnels, sans réelle concertation, résultats significatifs ou sincérité.
Une simple analyse des chiffres disponibles et des courbes tendancielles suffit à le prouver (notamment sur la baisse des émissions de gaz à effet de serre, ou la production d’énergies renouvelables).
Fin 2021, la Métropole NCA a publié un « Baromètre métropolitain de la Transition Écologique » très incomplet (y manquent encore les thèmes-clés des déchets et de l’artificialisation des sols), présentant même des informations de façon très discutable. Comme pour masquer les piètres résultats du plan Climat…
Comme le prévoit la loi, un bilan mi-parcours du plan climat doit être établi : le décret n° 2016-849 du 28 juin 2016 relatif au plan climat-air-énergie territorial (JORF n°0150 du 29 juin 2016) prévoit qu’« après trois ans d’application, la mise en œuvre du plan climat-air-énergie territorial fait l’objet d’un rapport mis à la disposition du public ». Ce bilan aurait donc dû être diffusé fin 2022. Or Pauline Hérouan, directrice de la Mission Climat et transition écologique, nous a précisé que « cette évaluation sera publiée au plus tard à l’automne 2023 », soit un an plus tard que ne le prévoit la loi.
C’est dans ce contexte qu’est annoncée la dissolution du Conseil de Métropole pour le climat ce 14 décembre 2022, trois ans après sa création dans le cadre du lancement du PCAET 2019-2025. Elle ne peut trouver d’autre justification que dans son absence de résultats concrets, à l’image de celle du PCAET en général. Cette annonce répond donc à une fuite en avant, qui ne parviendra pas à dissimuler l’échec, à ce jour, du plan climat niçois depuis son lancement initial en 2012 (PCET 2012-2018), il y a donc dix ans. Et l’échec, surtout, de la concertation et de la transparence dues aux citoyens niçois et métropolitains.
Ce Conseil de Métropole pour le climat se voit donc remplacé par un nouveau « Conseil local d’experts pour le climat », pompeusement baptisé « Haut Conseil pour le Climat » (pour mimer ce qui s’opère à Paris), qui ne laissera place qu’à des citoyens tirés au sort (un huissier sera-t-il présent ?). Façon, probablement, d’évacuer les quelques citoyens qui s’étaient fortement impliqués dans le Conseil de Métropole pour le climat mais jugés trop pressants à demander des comptes sur les engagements pourtant pris par la métropole elle-même, mais qu’elle juge probablement aujourd’hui complètement hors de portée.
Enfin, ce nouveau Conseil se focalisera sur « l’adaptation et la résilience », semblant mettre en marge l’indispensable politique de réduction des émissions de gaz à effet de serre (lutte contre les émissions), or la métropole Nice Côte d’Azur émet près de deux millions de tonnes de CO2 par an… et continue à décider ou à soutenir des projets climaticides, comme celui de l’extension de l’aéroport de Nice ou de la bétonisation de la basse Plaine du Var !
Nous dénonçons l’insincérité climatique et environnementale de Christian Estrosi !
Cet énième épisode démontre une fois encore que le maire-président Christian Estrosi est en échec depuis dix ans sur sa politique climatique et environnementale, essentiellement fondée sur de la communication, plus que sur des bilans solides, chiffrés et objectivables. Un début de réponse apparaît lorsque cet élu évoque une « écologie au service de l’économie » ou une « écologie de croissance », idéologies du « vieux monde » aujourd’hui dénoncées par de très nombreux experts…
Ce nouveau dispositif prévoit d’imaginer les solutions pour le plan Climat… Mais les solutions pour résoudre nos problèmes de CO2, pollution, énergie, sont déjà parfaitement identifiées ! Il n’y a nul besoin de ce nouveau comité Théodule pour faire semblant d’y réfléchir et retarder leur mise en œuvre : il faut juste de la volonté et du courage de la part de nos élus.
Deux questions subsistent :
- Quand le climat et l’environnement seront-ils traités de manière sérieuse ?
- Quand la concertation avec les acteurs de la société civile sera-t-elle authentique et sincère ?