La Côte d’Azur sur le grill climatique !
A peine commencé, l’été 2022 a déjà confirmé l’impact puissant du réchauffement climatique sur notre environnement et notre quotidien : canicules répétées, incendies monstrueux dans le sud-ouest et en Bretagne, sécheresses très marquées, notamment sur les Alpes-Maritimes, début de pénuries d’eau par endroits… Et ces phénomènes se répandent comme une traînée de poudre à travers la planète.
La bombe climatique est lancée, sous l’effet de l’émission cumulée de plusieurs milliers de milliards de tonnes de CO2 depuis le début de l’ère industrielle au XIXème siècle. Il s’agit à présent de tout mettre en œuvre pour réduire drastiquement nos émissions de CO2 pour atteindre au plus vite la neutralité carbone en 2050 au plus tard, autrement dit dans moins de 30 ans. A défaut d’une réaction urgente et massive, nous subirons des phénomènes climatiques de plus en plus difficiles et condamnons l’avenir de nos enfants et des générations futures.
Le pourtour méditerranéen se réchauffe plus vite qu’ailleurs …
Nous sommes d’ailleurs d’autant plus concernés que le pourtour méditerranéen, sur lequel nous vivons, subit un réchauffement 20% plus élevé (en bleu sur le graphe ci-dessous) que la moyenne mondiale (en vert sur le graphe), écart pouvant atteindre +50% dans les périodes estivales. Ensuite, si nos territoires se réchauffent, la mer Méditerranée, elle-même, voit sa température (et son acidification) augmenter : dès cette fin juillet 2022, pour la première fois, la température de l’eau en bordure de mer a approché les 30°C. Cette chaleur aquatique a évidemment de lourdes conséquences sur la faune et la flore marines… (lire aussi ici). Dernier point de vigilance : une mer chaude risque d’induire des épisodes méditerranéens (ou « cévenols ») beaucoup plus puissants à partir de septembre. C’était déjà le cas de la dramatique tempête Alex…
Et à en croire les climatologues, ça n’est qu’un début ! Les cartes de Météo France ci-dessous nous indiquent qu’en 2050, notre région, connaîtra des pics de températures de plus de 50°C !
La chaleur se concentre par ilots, notamment dans nos villes
Il se trouve que la chaleur n’est jamais répartie de manière totalement uniforme sur les territoires. Nous savons que les espaces forestiers sont plus frais, grâce au phénomène d’évapotranspiration (les arbres pompent l’eau dans le sol et la « suent » par les feuilles, rafraîchissant l’atmosphère). A contrario, les espaces minéralisés de nos villes, remplies de rues bituminées et de bâtiments en béton, absorbent la chaleur, et la restituent durant les nuits, empêchant un sommeil réparateur. En juillet 2022, de très nombreux habitants ont ainsi connu des nuits à plus de 30°C dans leur logement, durant plusieurs semaines… Ces zones de chaleur portent le nom d’ilot de chaleur urbain (ICU). La carte du CEREMA, ci-dessous, indique les LCZ (Zones Climatiques Locales) sur la ville de Nice : les ilots de chaleur sont identifiés par les couleurs orangées, brunes et noires. Il apparaît clairement que l’essentiel du centre-ville est très vulnérable à la chaleur, mais aussi la prétendue Ecovallée et l’aéroport.
La chaleur et l’humidité : un cocktail dangereux !
Il faut ici rappeler que les températures ne suffisent pas à décrire l’inconfort thermique de nos organismes. Un exemple : à 33°C de température ambiante, on peut tout aussi bien juste ressentir un inconfort, si le taux d’humidité est de 25%, ou risquer la mort, si ce taux atteint 95%. C’est le principe de l’indice Humidex, décrit dans le tableau ci-après. Or notre territoire longe la mer, qui apporte naturellement son lot d’humidité, par rapport à d’autres régions au climat plus continental et sec.
Cette situation est d’autant plus problématique que la ville de Nice abrite des milliers de logements anciens, très mal isolés au plan thermique. Ainsi, si les hivers imposent du chauffage souvent fortement émetteur de gaz à effet de serre et de particules fines, les étés imposent l’usage massif de la climatisation, très énergivore (10% de l’électricité mondiale), qui elle-même réchauffe nos rues. Par exemple, les ruelles étroites du vieux-Nice étaient autrefois fraîches, tandis qu’elles sont surchauffées aujourd’hui par les alignements de climatiseurs. Et devinez quoi ? Le plan de rénovation énergétique de la métropole Nice Côte d’Azur avance à la vitesse d’un sénateur cacochyme…
Les élus niçois n’ont pas pris la mesure du problème
Alors qu’il est question de survie, puisque les experts annoncent un emballement thermique hors de contrôle de la planète (« points de bascule »), la municipalité de Nice, visiblement très peu convaincue de l’utilité de lutter fortement contre les émissions de gaz à effet de serre, focalise son attention sur les projets de végétalisation : des arbres en pots par ici, une extension de la Promenade du Paillon par là, quelques cours d’école débarrassées du bitume, etc. C’est dérisoire, car absolument insuffisant face au réchauffement climatique. Christian Estrosi est malheureusement conseillé par son adjoint à l’Environnement Richard Chemla, qui a affirmé dans les colonnes de Nice-Presse, en 2021, qu’il « balayait d’un revers de main » les réductions des émissions de CO2 et qu’il fallait se donner du temps ! Comment est-ce encore possible de nos jours ?
Un impératif : abandonner les projets qui provoquent la chaleur
Abandonner impérativement les projets niçois qui provoquent l’augmentation de chaleur à Nice : l’agrandissement de l’aéroport (+7 millions de passagers annuels, soit +20.000 vols, soit encore +200.000 t CO2), les 3 millions de m2 de bétonisation à venir dans la plaine du Var, l’augmentation du surtourisme, la multiplication par 4 du tourisme d’affaires, les idées folles, comme installer un Grand Prix de Formule 1 dans les rues de Nice, etc. Abandonner ces projets anachroniques contribuera à réduire nos émissions de gaz à effet de serre, et donc de chaleur. Et les catastrophes qui en découlent : inondations meurtrières, tempête Alex, canicules, incendies gigantesques, etc.
Qui peut imaginer que, lorsque les températures dépasseront les 45° ou 50°C, tous les habitants de notre territoire iront se réfugier sous les quelques arbres des parcs urbains, du matin au soir ? La réalité sera tout autre : les gens se calfeutreront chez eux, sous le flux des climatiseurs quand ils pourront s’en doter. Et les autres souffriront, ou mourront de chaleur (rappelez-vous la mortalité liée à la canicule de 2003). Nous serons donc condamnés, pour des décennies et des siècles (pour nos successeurs), à subir des confinements thermiques, durant tous les mois de l’été, voire au-delà…
Il n’y a donc pas d’autre issue que de traquer toutes nos émissions de gaz à effet de serre (CO2, méthane CH4, N2O, etc.). Autrement dit, redonner toute la priorité à nos plans climat (ici, le Plan Climat Air Énergie Territorial PCAET). L’engagement pris d’une réduction de -55% des émissions d’ici 2030, dans huit ans, n’est pas une option ou un outil de communication, mais un impératif absolu. Celui d’atteindre la neutralité carbone en 2050, également. Or, dix ans après le lancement du 1er plan climat niçois (2012), il n’y a toujours pas l’ombre d’un tableau de bord ni d’indicateurs en 2022…
S’adapter pour le long terme, c’est réduire nos émissions carbonées massivement et au plus vite !
La seule adaptation possible pour l’humanité dont nous faisons partie est de sortir le carbone de nos modes de vie, de nos industries, de nos loisirs, de nos déplacements et de notre nourriture. Nous avons tous et toutes un vrai rôle à jouer, et les solutions sont parfaitement connues de nos politiques. Peut-être leur manque-t-il encore deux choses essentielles : la (vraie) prise de conscience et le (vrai) courage.
Il est temps que ça change !
2 thoughts on “La Côte d’Azur sur le grill climatique !”
Excellent article ce que l’on prévoyait ( et pas prédisait) se confirme, après mi juin et juillet la troisième vague de chaleur est annoncée! Et toujours des projets aberrants, des plantes en pots,un « plan » vélo irréaliste, etc,…Nous som-mes très vulnérables avec une mer en surchauffe et si nos températures diurnes stationnent pour l’instant vers 30°C la réalité des valeurs d’humidex très hautes est très inquié-tante de sensation d’inconfort à danger pour la santé…Alors que cela ne peut que s’amplifier…Le rôle des élus doit être d’y remédier par des solutions adaptées!
Bonjour Roger, merci pour le commentaire ! Oui, les élus ont évidemment un rôle crucial dans la mise en œuvre (courageuse) de (vraies) solutions. Mais il faut les y aider, ou parfois les y contraindre.
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