Les roues carrées du plan vélo niçois…
Le plan vélo niçois est un serpent de mer, ou une Arlésienne !
Régulièrement, la municipalité-métropole pérore sur les affichages publics, ou sur les plateaux médiatiques :
‘’La Métropole Nice Côte d’Azur constitue une grande terre de vélo’’,
‘’Nice est parfaitement adaptée à la pratique quotidienne du vélo’’ (C. Estrosi, 12 octobre 2018)…
Or la ville reste en queue de peloton des villes cyclables (11ème sur 12, en 2018, par la FUB : Fédération française des usagers de la bicyclette), avec un ‘’climat vélo défavorable’’ (F), renouvelé en 2021.
A ce jour, les engagements n’ont jamais été respectés
- En 2010 : objectif vélo du Plan Local d’Urbanisme (PLU, validé le 23 décembre 2010) : ‘’passer de 30 km en 2010 à 125 km en 2013’’. En 2019 : seulement 75 km… Objectif atteint à moins de 50%. Échec.
- En 2012 était annoncé le ‘’triplement du réseau interne de la ville de Nice de 63 km en 2012 à 190 km en 2020’’ (Plan Climat Énergie Territorial PCET, action IV-2-1 : ‘’Déployer le réseau cyclable’’). Échec.
- En 2013 : ‘’420 kilomètres de pistes cyclables en 2020’’ (Agenda 21 MNCA) : en 2021 n’en existent pourtant que 179 km à l’échelle métropolitaine (soit 42% de la cible)… Échec.
- En 2020 était annoncé : ‘’Jusqu’en 2026, un budget de 20 millions d’euros sera consacré au développement du cyclisme avec pour objectif 160 km de réseau cyclable et 10% de part modale (en 2024)’’.
- Puis, le 29 avril 2021, a été présenté le nouveau plan vélo : +160 km (ajoutés aux 179 km de la métropole NCA) et +75 km (ajoutés aux 84 km de Nice) à l’horizon 2026 et seulement 3,5 M€ par an (cf. Nice-Matin 2 mai 2021).
Et en 2022 ? La transparence n’étant pas la qualité première de la municipalité, les Niçois constatent des travaux épars dans leur ville, et le climat vélo ne s’améliore qu’aux marges extrêmes. Et ce n’est pas la nomination d’une « Madame Vélo », que bien peu connaissent, qui va changer la donne. Comme l’a rappelé le Collectif Citoyen 06, sur un tweet repris par Nice-Matin le 15 octobre 2021 : « Rappelons haut et fort que Nice n’est PAS une ville cyclable pour ses habitants : sous-équipée et dangereuse. Le vélo n’est pas qu’une affaire de tour de France !« .
Le maire de Nice, et son équipe, doivent comprendre que le vélo n’est pas destiné qu’aux compétiteurs ou aux touristes en goguette sur le littoral, mais aussi à sa population, pour ses déplacements quotidiens, partout sur la commune, à ses entreprises locales, pour leur logistique (cyclologistique), à celles et ceux qui se rendent à leur travail (vélotaf), aux enfants qui souhaitent s’exercer aux plaisirs de la petite reine.
Pour développer une culture vélo, notamment sur un territoire historiquement tourné vers la « bagnole » et les deux-roues motorisés (85.000, rien qu’à Nice), il faut APAISER la ville, tant dans sa partie littorale que dans son secteur collinaire. Or, qu’est-il annoncé ? Que la limitation 30 km/h en centre-ville est déjà repoussée à la fin de la mandature, en 2026, alors que des dizaines de villes françaises ont déjà mis cette mesure en place. Le secteur collinaire est très mal pourvu en trottoirs et en pistes cyclables (souvent pour des raisons d’étroitesse des voies). Pour autant, la vitesse y est toujours généralement limitée à 50 km/h, et très rarement respectée (et encore moins contrôlée par la police municipale). Les cyclistes risquent donc leur peau, au sens propre du terme, quand ils osent enfourcher leur monture, et les accidents sont nombreux.
Alors que la loi d’orientation des mobilités LOM, publiée au Journal officiel le 26 décembre 2019, prescrit une part modale de 9% pour le vélo en 2024, le maire de Nice a fait, comme à son habitude, œuvre de surenchère : à Nice, ce sera … 10%. Rappelons qu’en 2019, la part modale du vélo à Nice était de 1,4%, quand elle était de 15% à Strasbourg ! Autant dire que le challenge « 10% » est déjà plié dans le fond des cartons, au vu de ce qui a été décrit précédemment.
Et rappelons que le plan vélo métropolitain niçois n’a longtemps été doté que de 500.000 euros de budget annuel, bien loin des autres grandes métropoles, alors que le maire-président octroie chaque année une subvention très généreuse de 2 millions d’euros au Grand Prix de France F1 au Castellet (donc à l’extérieur du département, mais Christian Estrosi est président du GIP Grand Prix de France…). Devant les avancées franches de ses compétiteurs (maires écolos), et sous la pression des associations cyclistes (ex : Nice à Vélo), le budget a fini par être abondé à hauteur de 20 millions d’euros, sur une période de 6 ans. Le budget est une chose, mais la volonté et la façon de penser un réseau cyclable continu et sécurisé (autre chose que des bandes de peinture), de faire respecter les règles (contre, par exemple, les excès de vitesse, les incivilités, les doubles et triples files), ont sont d’autres.
Nice pense donc encore compenser son retard colossal par des promesses et des slogans
Tous les kilomètres annoncés suffiront-ils à atteindre une part modale de 10% en 2024 (l’adjoint Gaël Nofri commençant à faire glisser discrètement cette date à 2026…) ? Aucun lien n’est d’ailleurs fait entre cette annonce de kilométrage de réseau et l’engagement de la ville d’atteindre une part modale de 10% en 2024. Passer de 2% en 2021 à 10% en 2024, nécessite une croissance de la pratique vélo de +70% par an sur chacune des trois années… Qui peut encore y croire ?
Le développement de l’espace public réservé au vélo devant évidemment se faire au détriment de celui de l’omniprésence de la voiture en ville, la municipalité pédale en réalité à reculons, repoussant les échéances, ne réalisant pas ses promesses et ce, année après année. Encore une fois, l’enjeu politicien est de ne pas toucher à la ‘’bagnole’’ par crainte de voir ses électeurs le quitter pour les partis d’extrême-droite, qui sont vent debout dès qu’on touche aux automobilistes et à leurs déesses à quatre roues !
Quel impact sur le plan climat ?
A condition que, cette fois-ci, le réseau vélo soit réellement développé et que la part modale vélo atteigne les 10%, le gain en CO2 serait d’environ -28.000 T CO2[1] sur les -183.000 à réduire (sous responsabilité directe MNCA), soit 15% de l’effort ‘’part propre à MNCA’’ d’ici 2026, ou même 3% de la réduction globale des émissions de GES territoriales entre 2018 et 2030 (-55%)[2].
[1] Source MNCA : estimations d’un transfert modal vers le vélo de 2% sur 300.000 VL (vers le vélo) x 2% de transfert modal voiture vers vélo x 5000 kms/an x 0,235 kg CO2 /km = 7.000 t CO2 par tranche de 2% de transfert de part modale.
[2] 28.000 T sur 898.000 T = 3%. Ces 898.000 tonnes de réduction sont l’écart entre le BEGES 2018 (Bilan EGES) et la cible BEGES 2030 pour l’ensemble du territoire MNCA (part propre et autre).